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BOLD #42

On fait comment pour ne pas y penser ?

L’article paru début septembre sur 20minutes.fr a de quoi raviver des craintes qu’on a bien du mal à chasser de nos cerveaux depuis quelques mois. Des attentats à Metz, à moins d’une heure de route de Luxembourg? C’est ce qui aurait été évité selon le quotidien marocain Assabah – dont 20minutes s’est fait l’écho – qui croit savoir que «deux Marocains radicalisés et expulsés de France vers le Maroc la semaine dernière (ndlr: fin août) s’apprêtaient à attaquer des lieux publics, restaurant et night-club à Metz», notamment sur la place de la République. Selon les autorités marocaines, ces partisans du groupe Etat islamique comptaient commettre des «attentats d’envergure» dans les deux pays, avec la volonté de causer un carnage semblable à ceux qui ont frappé Paris en novembre dernier (cent trente morts) et Nice mi-juillet (quatre-vingt-six morts).

Si l’on s’étonne parfois de se sentir si loin de la menace au Grand-Duché, difficile de ne pas y penser quand on le quitte, que ce soit depuis le Findel pour un week-end à peu près n’importe où en Europe, ou au volant de sa bagnole pour passer un moment qu’on aimerait sympa, quelque part dans la Grande Région. Les chaînes d’info, les radios et les journaux ne peuvent occulter cette réalité. Notre génération totalement addict aux réseaux sociaux ne peut pas davantage se retenir de réagir de quelque façon que ce soit.

Et si l’on se l’interdisait? C’est en partie la question soulevée par un billet personnel qu’on a pu lire sur LinkedIn (intitulé: «pourquoi je ne partage plus mon émotion sur les réseaux sociaux») avant Nice et après Paris, pertinent et gênant à la fois. Le partage d’images, de vidéos, de témoignages ou d’expressions de notre propre douleur ferait le jeu des terroristes en propageant de manière exponentielle l’onde de choc, comme si l’on étendait le périmètre d’impact des explosions et qu’on se blessait psychiquement les uns les autres, affaiblissant sans cesse notre résilience. Il n’y a pas besoin d’avoir été au plus près du drame pour en être affecté au plus profond de son être, toutes ces répliques générées par notre propre empathie se chargent d’entretenir la colère et/ou la crainte.

Mais prendre de la distance, se taire, s’autocensurer afin de soulager sa santé, c’est peut-être aussi prendre le risque de s’y habituer. Cela peut avoir l’apparence d’un cliché bidon ou d’une phrase à la con, mais la réponse est sans doute en chacun de nous et en notre capacité à savoir placer le curseur à la juste distance de ces événements traumatisants. Pour ne pas sombrer, sans toutefois oublier.

Raphaël Ferber

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