Get Out, entre thriller et film d’horreur
“Get Out” aurait pu être un drame familial sur le racisme, mais il surprend en choisissant un chemin sinueux, entre thriller et film d’horreur : après une entrée fracassante aux États-Unis malgré son petit budget, le premier film de l’humoriste américain Jordan Peele sort ce mercredi.
“Get Out” suit le parcours d’un photographe noir, Chris, invité par sa petite amie blanche Rose à passer un week-end dans sa famille. D’abord angoissé par la réaction de cette famille face à sa couleur de peau, Chris ressent rapidement un étrange malaise : sourires accueillants un peu trop insistants, domestiques noirs à l’attitude plus qu’étrange… Pour sa toute première réalisation, l’humoriste Jordan Peele, qui s’est fait connaître en animant sur cinq saisons une émission de duo comique, voulait faire “un film qui reflète certaines de (ses) peurs, et certains problèmes auxquels (il a) été confronté”.
“J’ai réalisé que le racisme n’avait pas été abordé par le biais de l’horreur depuis +La Nuit des morts vivants+” en 1968, a-t-il expliqué. Lui-même afro-américain, le jeune réalisateur et scénariste aborde les relations inter-communautaires avec beaucoup de justesse : il excelle à montrer le racisme “ordinaire” de progressistes pourtant bienveillants. “Quand Obama était président, il y avait cette impression dans le pays que l’on ne voulait pas parler du racisme. C’était comme si on se disait “oh, il y a un président noir, donc il n’y a plus de racisme””, souligne-t-il. “Ce film est là pour montrer que même si certaines choses ont l’air agréables en surface, il y a un monstre en-dessous”.
Et si la révélation finale remet le film en perspective et ne sera pas forcément au goût de tous, il reste le talent du réalisateur de 38 ans. Ambiance, timing et hors-champ, avec des plans parfaitement maîtrisés comme dans la scène d’introduction: Jordan Peele joue à la perfection sur les codes de l’horreur, tout en restant plus proche du thriller.
Jackpot aux Etats-Unis
Alors que tout le monde l’attendait sur une comédie légère pour une première réalisation, le trentenaire surprend avec ce film plus proche de “Rosemary’s Baby” de Roman Polanski que du film déjanté “Keanu”, où il jouait le rôle principal. Mais son producteur, Jason Blum (“Paranormal Activity”, “American Nightmare” mais aussi “Whiplash”) estime “qu’il y a en fait beaucoup de points communs entre l’humour et l’épouvante : le timing d’une blague ou d’un moment effrayant et la façon dont ils se construisent sont très semblables”.
Avec un film d’horreur, “vous avez le droit d’être de mauvais goût, d’être irrévérencieux. Cela aide à aborder certains sujets dont il est difficile de parler”, renchérit le réalisateur. Le film est porté par un casting de choix, faisant une place important à des figures montantes. Daniel Kaluuya (“Sicario”, “Black Mirror”) est profondément humain et touchant dans le rôle du héros. Sa compagne est interprétée par Allison Williams – repérée dans la série “Girls” -, qui se révèle au fur et à mesure du film, dévoilant des pans inattendus de son personnage.
Mais le film retient l’attention aussi et surtout par ses seconds rôles réussis. Betty Gabriel est savoureuse dans le rôle de Georgina, la domestique inquiétante typique des films d’horreur. Milton “Lil Rel” Howery incarne quant à lui le truculent meilleur ami du héros, qui apporte une touche d’humour bienvenue. “Get out” a fait un démarrage remarqué aux États-Unis, où il s’est installé en tête du box-office la semaine de sa sortie. Avec un budget de seulement 5 millions de dollars, le film est déjà plus que rentable.
Il a récolté 33,4 millions de dollars lors de son premier week-end dans les salles américaines, et affichait plus de 165 millions de dollars de recettes aux Etats-Unis après huit semaines d’exploitation.