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BOLD #45

JE NOUS AIME

On dirait que le polyamour est un thème à la mode. En tout cas, c’est l’impression que j’ai en regardant par le trou de la serrure du net, ce mur Facebook abreuvé d’infos sur les nouvelles tendances sociétales, et aussi à travers ces discussions sur le fil qu’on a entre potes quand on remue un peu le bordel que peut être la vie d’un trentenaire en 2017. Personnellement, je ressors toujours de ces conversations avec le sentiment d’être le gros catho-romantique de la société, et ça me «chagrine» un peu.
D’autant que Dieu le sait mieux que quiconque: la dernière fois que je lui ai rendu visite, avec mon photographe, c’était pour mettre un chien sur un autel aux côtés de ses maîtres et claquer une photo cool en couv’ du mag’.
Il n’y a pas que les médias qui s’intéressent d’un peu plus près à cette question (pas celle du chien). En ce dimanche un peu pourri, je sais que tous les dolipranes de l’armoire ne peuvent pas mieux soulager ce mal de crâne qu’une nouvelle série « feel good ». You Me Her a surgi de Netflix, comme ça. Et s’est avérée plus intelligente, plus juste et plus drôle que je ne l’avais pressenti. Quant au thème, je vous le donne en mille…
Dans ce système «open», qui semble mixer tout ce qu’il y a de bon dans les vies de couple et de célibataire, la jalousie, la honte et les cachoteries ne devraient plus avoir leur place. Tout n’est qu’amour entre jeunes gens consentants, non? Et pourtant, ces sentiments qu’on fuit sont toujours là. Ils existent, on les sent. Le fric semble même être une alternative beaucoup plus sage, plus saine, plus réglo, pour dealer rien que du sexe et du plaisir, et étouffer tout le reste. Les curseurs se déplacent juste un peu, on y perd ses repères. Moi, je n’ai pas moins mal à la tête. Je m’accroche à certaines réactions pour sortir un : «Ah, tu vois bien que le polyamour ne marche pas!»
Mais l’histoire continue, sans plus ni moins de larmes et de smiles sur les visages que dans une autre aventure plus conventionnelle. Stephan Streker, réalisateur de Noces, me disait récemment : «J’aime quand un film soulève plus de questions qu’il n’apporte de réponses.» Son film, une coproduction luxembourgeoise – que je vous invite à aller voir dans les cinés du Grand Duché, ou plus tard en Blu-ray – traite de l’amour que la tradition veut contrôler là où celui de You Me Her veut s’affranchir des limites séculaires. Théoriser, militer pour l’ouverture d’esprit jusqu’à l’overdose, c’est génial. Mais il est plus intéressant encore de voir ce que ça donne en vrai, les situations que ça génère, les émotions que ça engendre, les nouvelles questions que ça pose. C’est pourquoi You Me Her m’a intéressé ce jour-là, même si au final, les questions restent toujours plus nombreuses que les réponses.
«Je nous aime» est bien l’une des citations qui m’a fait revenir à ma réalité, avec la perspective de réaliser une petite pirouette. Peut-être l’arrivée du printemps. «Je nous aime»: vous, moi, nous, l’équipe derrière Bold, les gens qui partent et qui vont nous manquer grave, et ceux qui nous rejoignent bientôt. N’est-ce pas une autre forme de polyamour?

Raphaël Ferber

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