Jain : « Créer une bulle utopiste où l’on peut se réfugier »
Élue artiste féminine aux Victoires de la musique en 2017 avec son album Zanaka et nominée aux Grammy Awards pour son clip Makeba, Jain a fait son retour l’année dernière avec Souldierun opus, qui, comme son prédécesseur, propose autant de titres que de tubes qui font danser la planète.
Riche de ses expériences à travers le monde, influencée par les musiques africaines et par le hip-hop américain, Jain s’est construit un univers surréaliste, semblable à celui d’un Magritte qu’elle adore. Alors que ses clips font des dizaines de millions de vues sur YouTube et que ses concerts affichent complet, elle nous a accordé un peu de temps avant son passage à la Rockhal, en mai prochain, afin de revenir sur son univers, ses nombreux voyages et son enfance passée entre la France, Dubaï, le Congo ou encore Abu Dhabi, qui, ont participé au métissage de ses propres compositions.
Après le succès de Zanaka, il y a eu beaucoup d’attente du public autour de la sortie de Souldier, votre deuxième album. Avez-vous eu une pression supplémentaire ?
Pas vraiment. Je me suis dit : peu importe si cela fonctionne ou pas, j’ai déjà la chance de faire un deuxième album. C’était surtout important qu’il me plaise autant que le premier. Me faire plaisir a vraiment été ma priorité.
Zanakasignifie « Enfant » en malgache. Avec Souldier, c’était important de montrer que l’enfant était devenu un soldat ?
Exactement, même s’il reste un soldat gentil, un soldat qui se bat avec une fleur (sourire). C’était surtout ça l’idée. J’ai écrit l’album dans une période un peu compliquée et j’avais envie de créer une sorte de bulle utopiste où l’on peut se réfugier et se sentir bien dans l’instant présent.
Vous avez déclaré que vos chansons se terminaient toujours bien. C’était un peu ça l’idée ?
Oui (rires), après c’est vrai que lorsque j’écris une chanson j’ai besoin de me consoler. C’est une sorte de thérapie, donc forcément, il faut que ça finisse bien, sinon ça n’aide pas. J’ai toujours bien aimé les musiques assez solaires. Que ce soit les Beatles ou encore Bob Marley, le fait que la musique reste optimiste me touche.
C’est important, pour vous, de raconter une partie de votre histoire dans vos chansons ?
C’est vrai que j’avais beaucoup parlé du Congo dans mon premier album. Dans Souldierj’avais davantage envie de raconter une autre partie de ma vie, à savoir mon arrivée à Abu Dhabi, puis à Paris, et tout ce que cela a pu apporter dans ma musique. L’idée est vraiment de brasser différentes cultures et de ne pas rester bloquée dans de ce mélange pop, electro, musiques africaines.
Vous avez passé votre enfance entre le Congo, Dubaï, Abu Dhabi et Pau. On imagine que les cultures des différents pays par lesquels vous êtes passé ont façonné votre personnage…
Carrément ! Je me considère très chanceuse d’avoir eu l’opportunité de vivre dans beaucoup de pays différents. Aujourd’hui encore, cela m’apporte énormément de choses et cela continue de m’inspirer aussi. Ça m’a permis de voir une petite partie du monde, mais d’une autre manière. C’est cela qui est finalement très inspirant pour moi et qui me donne envie d’écrire.
Avant tout cela justement, qu’est-ce qui vous a donné envie de faire de la musique ?
C’est venu assez tard, en fait, à l’âge de 16 ans, quand j’étais au Congo. C’était peut-être une espèce de crise d’ado, et j’avais envie de dire des choses qui me tenaient à cœur. Chanter était une façon plus naturelle de m’exprimer. Je ne me considérais pas comme une chanteuse ; c’était un moyen d’expression avant tout.
Vous êtes l’une des artistes francophones qui s’exporte le mieux à l’étranger. Est-ce que le fait de vous dire que votre musique dépasse les frontières vous rajoute une pression supplémentaire ?
Une pression, je ne sais pas. Disons que, lorsque je vais à l’étranger, ce n’est pas pour percer. J’y vais avant tout pour rencontrer les gens, faire des shows, des lives et que l’on puisse créer une sorte d’unité, même si on ne vient pas de la même culture. Ce qui m’importe et me plaît le plus, quand je suis en tournée, c’est vraiment rencontrer les gens et apprendre des nouvelles musiques et des nouveaux rythmes.
On imagine qu’en fonction des pays votre approche avec le public n’est pas la même…
Il y a des différences. Mais, vous savez, même en France, les shows diffèrent beaucoup selon les villes et les régions. Certains publics qui sont hyper chauds et d’autres beaucoup plus froids. Malgré tout, on peut retrouver la même atmosphère à Paris qu’à Los Angeles, par exemple. Après, dans des pays comme le Japon, c’est vrai que c’est assez différent du public européen. Du coup c’est vrai que c’est super intéressant de voir à quel point les cultures peuvent influer dans la manière d’écouter un spectacle.
Est-ce que ces différences que vous évoquez influent sur votre manière de vous produire sur scène ?
Je m’adapte effectivement. C’est fondamental pour que le show se passe bien. Cette flexibilité, je l’ai apprise très jeune, parce que nous avons beaucoup déménagé. C’est une force qui me sert beaucoup quand je suis sur scène. Mais c’est ça qui est magique aussi finalement, il se passe toujours autre chose en fonction des pays dans lesquels j’ai la chance d’aller.
Dans la chanson Star, vous faites référence au phénomène de starification, qui est de plus en plus présent avec les réseaux sociaux. Contrairement à beaucoup d’artistes de votre génération, vous semblez accorder moins d’importance à tout cela. Pourquoi ?
C’est vrai que, lorsque je vais regarder les Instagram des autres, j’ai l’impression d’être un peu un extraterrestre (rires). Pour être tout à fait honnête, j’aime bien mettre des photos que je trouve jolies, mais c’est vrai, qu’étant donné que je suis plutôt timide et introverti, je n’aime pas forcément dévoiler des trucs sur moi. Cela se ressent sur les réseaux. Je pense aussi que c’est quelque chose qui me protège.
Vous passez par le Luxembourg en mai prochain, c’est un pays que vous connaissez ?
Je ne connais pas trop pour être honnête, en dehors de la Rockhal bien sûr (sourire) ! Mais en tout cas, je garde un excellent souvenir du public.
L’intégralité de l’interview est à retrouver dans le Bold 57 disponible ICI