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Johan Papaconstantino, en clair-obscur

Interview : Helena Coupette

« OVNI » d’une nouvelle scène musicale qu’on peine à définir, Johan Papaconstantino dessine pourtant les contours du groove qui nous fera danser demain. Des sons colorés, kaléidoscopiques et finalement sexy qui empruntent autant leurs réf’ à PNL qu’à Django Reinhardt. Autodidacte et un peu poète sur les bords, le Marseillais exilé à Paris, évolue entre peinture et mélodie. Deux disciplines où se mêlent l’hyper contemporain et les traditions, le bouzouki et l’auto-tune, « Le Caravage et Windows 98 ». Sorte de clair-obscur, à « contre-jour », comme un hommage à la musique grecque et orientale, qui a bercé son enfance et à la pop-culture qui a façonné son goût pour l’électro. Vous prendrez bien un Grec avec tout ?

De quoi t’inspires-tu pour créer ? 

C’est un processus très perso. Par exemple, l’envie de partager certaines sensations que je ressens lorsque j’écoute des tracks avec d’autres personnes. J’essaie de les reproduire, de me les approprier pour créer de nouvelles émotions, qui me soient propres, au-delà de simplement refaire des choses qui m’ont plu. Sinon, je serais DJ (sourire). J’ai aussi envie de m’essayer à des compos plus audacieuses, des mélanges, tout en continuant de procurer des sentiments simples comme l’amour de la musique. 

Écris-tu toi-même tous tes textes ? 

Je fais vraiment tout, de A à Z. J’aime justement écrire et créer. Je mixe aussi de plus en plus. Je m’entoure d’autres collaborateurs pour concevoir les clips, je participe à la direction artistique. Je ne filme juste pas moi-même. J’ai toujours une idée en tête au départ, une vision de ce que je souhaite ou pas. 

Certaines paroles ne sont pas forcément très accessibles, je pense par exemple à « Iris œil ». C’est un parti pris ? 

Même si je cherche toujours à ce qu’ils aient du sens, mes textes peuvent sembler abstraits, décousus ou flous. Ce ne sont pas des histoires simples : « je marche dans la rue, je rencontre quelqu’un ». Je ne veux pas écrire ainsi, ces paroles me viennent simplement naturellement, parfois de façon plus concrète. Le processus reste très compliqué pour moi. Je trouve d’abord les mélodies, donc le texte doit matcher avec l’air. Selon la musique, certaines choses paraissent ringardes, surtout en français. On n’ose moins qu’avec d’autres langues. Si tu traduis parfois certaines paroles en anglais, tu te dis « c’est chaud quand même ». 

Tes clips sont très visuels. En quoi est-ce important de lier l’image et le son ? 

Je me considère autant peintre que musicien. Le visuel a de l’importance, encore plus aujourd’hui. Sans ça, certains morceaux ne serviraient à rien. Sans parler forcément de moi, mais dans l’industrie musicale en générale, beaucoup d’images appuient la musique et aide à mieux la comprendre. 

Tu as lancé tes premières chansons sur Soundcloud. Peux-tu m’en dire plus ? 

J’ai commencé avec des petites instru’, très peu formelles, puis j’ai rapidement voulu produire des chansons entières. C’est-à-dire, créer un morceau avec une intro, un couplet, un refrain, un solo. Je me rends compte que j’aime ça. J’évoluais dans un environnement où tout était très expérimental autour de moi. Je pense, qu’en réaction, j’ai voulu me diriger vers des formats plus classiques. 

Aurais-tu pu percer sans ces plateformes ? 

J’ai démarré sur YouTube, avec mon premier clip. Sans, ça signifie sans Internet aussi, donc à une autre époque. Je ne sais pas comment j’aurais réagi. Dans tous les cas, j’aurais fait de la musique. Avant de me lancer seul sur Soundcloud, je me produisais sur scène avec d’autres projets. 

Tu es aussi présent sur Instagram. Quel rapport entretiens-tu aux réseaux sociaux ? 

Je ne suis pas très actif en réalité. Je regarde ce qu’il s’y passe, en restant assez discret. Je n’y suis pas très à l’aise car je n’ai pas envie de parler pour ne rien dire. Je préfère montrer des choses intéressantes plutôt que de poster ce que je fais en studio. Ce n’est pas un outil pour de l’auto-promo. 

As-tu toujours voulu devenir musicien, ou est-ce une envie qui a évolué au cours de ta vie ? 

Ce n’était pas un truc depuis tout petit, où je me suis dit ‘je veux faire ce métier’. J’ai toujours adoré la musique, comme tout le monde, sans vouloir forcément chanter. J’ai bien sûr écouté des artistes dont j’étais fan, mais davantage avec l’envie de devenir musicien. La voix est venue après, je la considère comme un instrument. Elle touche d’ailleurs beaucoup plus parfois que certains instruments.

Tu as repris les Mots Bleus de Christophe. Comment s’est faite cette cover ?

L’idée ne vient pas de moi. J’avais fait une résidence dans l’émission Foule Sentimentale, de Didier Varraud sur France Inter. Selon la tradition, chaque artiste doit reprendre une chanson française. J’ai opté pour les Mots bleus et très vite, je me la suis appropriée. J’ai posé les accords, ajouté une petite ligne de batterie, commencé à chanter. Les sensations étaient cool. 

Dirais-tu qu’elle a marqué un tournant dans ta carrière ? 

C’est une chanson importante pour moi et c’est aussi l’une de celle qui a rencontré le plus de succès, peut-être lié au fait que Christophe soit décédé mais même au-delà, j’avais de très bons retours. Je la considère davantage comme une expérience qui m’a fait kiffer que comme un réel tournant. Il est toujours plus facile de chanter des choses que l’on n’a pas écrit. 

Quel effet ça fait de t’entendre à la radio ? 

Je n’écoute pas la radio en réalité. Lorsque j’entends des gens écouter ma musique, évidemment je suis hyper heureux. Pour moi, la meilleure récompense est d’entendre le son d’une de mes musiques au loin. 

As-tu déjà une date pour ton prochain projet ? 

Je travaille beaucoup cet album, mais il n’est pas encore prêt. Je suis comme un geek au studio, tous les jours. J’aimerais bien sortir un single avant la fin de l’année. L’album sera pour plus tard.