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La Review : les derniers jours de « Never Vera Blue » au TOL

Au Théâtre Ouvert de Luxembourg, Aude-Laurence Biver met en scène une femme à la dérive, prisonnière des abus d’un mari manipulateur et campée avec brio avec Émeline Touron. Pour deux soirs encore ! 

Au fil des années de mariage, une femme se met à douter d’elle-même, jusqu’à ne plus être capable d’affirmer combien elle mesure : « 1 mètre 75, 1 mètre 78, qu’est-ce que ça change ? ». Prisonnière, elle se pose cette question vitale : comment (se) sortir de là ? Derrière ce synopsis qui pourrait sembler presque banal se cache le personnage principal d’un texte percutant de l’auteure anglaise Alexandra Wood et choisi par Aude-Laurence Biver pour sa nouvelle réalisation au TOL. Une femme cloitrée en elle, dans une tentative maladroite et désespérée d’échapper au harcèlement moral insidieux, puis éventuellement physique d’un mari pédant, narcissique et manipulateur. Un bon gros con, on s’en rend vite compte. 

Pour le fuir, elle s’est créé un monde intérieur : un estomac, celui de ce dernier, qui la retient dans un monde inconnu où le temps et l’espace n’existent plus – du moins au début de la pièce – et dans lequel elle mène une aventure…presque légère.

Mais l’interprétation juste et progressive d’Émeline Touron, qui campe cette mère de deux jeunes filles bourgeoise qui ne comprend plus qui elle est, va vite imposer un ton de plus en plus grave et percutant, tout comme les révélations qu’elle fait au public. 

À ses côtés dans cette quête d’intégrité et de réappropriation de son destin, elle trouvera des alliées pour le moins originales : des plantes qui, par leur comportement « miraculeux » et à 2 doigts de devenir anthropomorphique, vont remplacer les amies perdues du fait de sa relation conjugale toxique. La première, appelée Never, lui fait coucou le matin. L’autre Vera, tient compagnie à la première et lui chuchote des choses… La troisième, Blue, offerte par le vicieux mari, « avec des fleurs bleues comme des javelots », va s’avérer tenir de lui et devenir un véritable vampire pour ses 2 voisines de fenêtre… 

Au fur et à mesure de l’évolution que celle dont on ne connait pas le nom va tenter de s’éloigner du harcèlement qu’elle vit chaque jour chez elle tout en protégeant ses filles, elle se confiera à ses plantes et trouvera les astuces qui la mèneront à se libérer de l’estomac fatal… Non sans mal ni sacrifice. Elle se réfugie aussi régulièrement dans le ventre du loup du Petit Chaperon Rouge ou dans une histoire de soldat quelconque, 2 univers pas franchement utiles au déroulement de l’histoire et dont on aurait pu se passer… 

Mais la mise en scène de Biver compense vite par son intelligence, faussement minimaliste avec un jeu de lumière particulièrement réussi, une structure centrale modulable et la présence toujours rassurante de Never et de Vera. C’est juste, sans fioriture inutile. Quant au jeu d’Émeline Touron, il vaut à lui seul le détour, avec des nuances maitrisées qui nous rendent son personnage terriblement réel. Donnant l’impression d’être en permanence sur le point de craquer complètement, elle nous fait penser à Ellen, la géniale voisine de Ginny & Georgia dans la série Netflix à succès du même nom. Avant que le craquage, la spirale sur fond de petit pull marine, la reprise du pouvoir sur elle-même. 

Il ne reste que 2 soirs pour découvrir ce joli spectacle « sweet & sour » au TOL : ces jeudi 2 et vendredi 3 février. Infos et réservations sur www.tol.lu