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L’interview complètement perchée de Bony King

Texte Godefroy Gordet
Photos DRIES SEGERS

Auteur et interprète Belge originaire de Gand, Bram Vanparys alias (The) Bony King (of Nowhere) partage une musique d’inspiration folk américaine, plutôt roots et parfois presque pop… Musicien acclamé par la critique musicale alternative, le multi-instrumentiste sort Alas my love en 2009, un premier disque produit par Koen Gisen en collaboration avec EMI, pour atteindre rapidement le top 10 des ventes en Belgique. Souvent comparé à Fleet Foxes, Bon Iver, Devendra Banhart ou d’autres compositeurs alternatifs de la scène folk rock, le jeune artiste a dans sa discographie des perles telles que l’intime Eleonore, l’étincelant The Bony King of Nowhere, la B.O. du film Les Géants et depuis le 13 mars dernier Wild Flower, un dernier album musicalement virtuose et sensitivement apaisant et réconfortant. Bony King répond à nos questions perché à 12 000 au-dessus des nuages…

  • Bony King qui es tu?

Hé bien c’est l’une des questions les plus faciles à poser à une personne mais c’est certainement l’une des plus dure à répondre. Est-ce que tu sais qui tu es? Serais-tu capable de te décrire en quelques minutes? Personnellement je pense qu’on ne connaît jamais la réponse à cette question. Je peux te dire que je suis un musicien, mais est-ce que ça expliquerait quelque chose? On passe toute sa vie à essayer de trouver une réponse à cette question, alors je crains de ne pas être en mesure de te donner une réponse satisfaisante à l’heure actuelle.

  • Comment as tu découvert la musique?

As-tu déjà entendu parlé de Columbus? Comment il a en quelque sorte découvert l’Amérique? He bien la vérité c’est que ce mec là n’a rien découvert du tout. Tu veux savoir pourquoi? Parce que c’était déjà là! Depuis des siècles. Des siècles! Je te le dis. Alors, qui peut dire qu’il a découvert quoi que ce soit? Je ne crois pas dans le fait de «découvrir». Tout est déjà là, c’est comme ça et ce sera toujours comme ça…

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  • J’ai lu que tu tires ton nom du titre There There de l’album Hail to the Thief (2003) de Radiohead, que représente cette chanson pour toi?

Hail to the Thief c’est bien le titre de l’album non? Qu’est-ce qu’un voleur de toute façon, est ce quelqu’un de bon? Ou quelqu’un de mauvais? Un voleur vole t-il les bonnes personnes ou des mauvaises personnes? Je me demande combien de personnes dans ce monde pensent qu’ils sont des mauvaises personnes? Je pense que la plupart des gens qui sont considérés comme mauvais par la majorité se voient comme des bonnes personnes, ou au moins comme des personnes pas si mauvaises. C’est là que les choses deviennent intéressantes. Car, qui peut dire qui est mauvais et qui ne l’est pas? Où placer les limites? Dans certains pays, une personne peut être une mauvaise personne alors que dans d’autres cette personne pourrait être un héros. Alors, qui peut dire que cette personne est bonne ou mauvaise? Maintenant, «Hail to the Thief»! Ramenez-le et donnez-lui un bonbon!

  • Depuis ton travail sur le film Les Géants (2011) de Bouli Lanners, comment a évolué ta musique?

Aujourd’hui, je peux te dire qu’elle a évolué mais s’il te plaît ne me demande pas comment, parce que je ne sais pas. Ce qui est sûr c’est que mon travail pour Bouli m’a mis dans la tête de faire un album solo. C’est la seule chose que je sais. Une autre chose qui est certaine c’est que tout dans ce monde est en mouvement, tout évolue, mais il est toujours difficile de savoir où les choses vont nous emmener. Avec le recul, dans la plupart des cas, il est vraiment difficile de déterminer exactement comment les choses vont évoluer. C’est différent avec le temps qu’il fait par exemple, car c’est quelque chose que nous pouvons mesurer. Les choses que nous pouvons mesurer sont faciles, ou du moins plus facile à évaluer et donc à décrire leur évolution. Des choses comme les émotions, les sentiments, l’art, ou notre «personnage», ces choses ne peuvent pas être mesurées et sont donc plus difficiles à évaluer et décrire leur évolution. A part ça, Bouli est un homme très agréable et j’ai pris beaucoup de plaisir à bosser avec lui.

  • Wild Flowers ton dernier disque est sorti le 13 mars. Comme pour ton troisième disque The Bony King Of Nowhere, tu t’es encore une fois isolé pour écrire ce disque?

Je n’ai pas vraiment écrit le précédent album dans un endroit isolé. J’ai écrit la plupart des chansons en tournée, partout en Europe. Mais j’ai enregistré l’album dans une maison quelque part dans les bois, assez isolée, je dois dire. C’est assez intéressant de travailler comme ça et je recommande à tous les artistes de le faire, mais je pense que c’est bien de le faire qu’une seule fois. On apprend beaucoup à faire ça une fois sur trois ou quatre semaines d’affilée. Après ça la plupart des gens sauront ce qu’ils ont à en tirer, ensuite tu peux passer à autre chose. Je n’ai aucune raison de la faire à nouveau. C’est pour ça que je suis arrivé à Los Angeles pour l’enregistrement de Wild Flowers. C’est comme ça que tout peut rester en mouvement. C’est une chose qui se fait en aller-simple, il y a beaucoup d’autres voies à prendre et de routes sinueuses. La seule chose qui importe, c’est quelle autre voie prendre et quand.

  • Quel ressentit tu avais avant l’enregistrement, puis après l’avoir finalisé?

Ce que je ressens à chaque album. Avant les enregistrements il y a beaucoup de chaos. Pas au sens pratique, mais au sens mental. Je suppose que c’est pour ça que l’enregistrement est nécessaire et important dans l’ensemble du processus. Tu as la chance de pouvoir remettre toutes les choses de ton esprit en ordre. C’est comme si enregistrer les chansons que tu as écrites dans les derniers mois te permettait de faire le vide dans ton esprit. C’est vraiment bon pour la santé. Un artiste doit créer et terminer les choses pour rester en bonne santé. La création est le fruit de l’artiste. C’est ce que l’enregistrement permet de faire. Ça n’a rien à voir avec le fait de voir un médecin.

  • C’est quoi l’histoire de Wild Flowers?

Il n’y a pas d’histoire dans Wild Flowers. Ce n’est pas un disque sur une certaine chose et une histoire qui se cache derrière tout cela. C’EST une histoire, tu vois? Je n’ai pas besoin d’une histoire pour vendre cet album, comme la plupart des albums de nos jours qui ont besoin d’une «histoire derrière l’album». Pourquoi tout doit avoir une histoire de toute façon? Pourquoi ça ne pourrait pas juste exister comme ça? Pourquoi l’histoire elle-même ne suffit pas et pourquoi chaque histoire doit avoir «une histoire sur ou derrière l’histoire»? L’histoire de Wild Flowers est que c’est un album musical, et c’est ce qu’il est. La musique suffit. Si vous voulez des histoires, tout est dans la musique et les paroles.

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  • Tu es résolument tourné vers l’acoustique, une sorte de folk guitare/voix à la Bob Dylan ou Joan Baez… Qui sont tes maitres, tes influences?

Bob Dylan est un grand musicien. Ce n’est pas seulement la mélodie, la musique ou simplement les paroles. Chez Bob Dylan il s’agit de toutes ces choses à la fois, elles sont toutes au même niveau, toutes aussi grandes, dans tous leurs aspects. Même quand il n’est pas génial, il est génial de l’être. C’est un véritable artiste dans tous les sens du terme. Personnellement je n’essaie pas d’être folk ou quelque chose comme ça, je ne cherche pas à mettre à tout prix un nom sur ce que je fais. La chose la plus importante que j’ai apprise de Dylan c’est qu’il faut rester fidèle à soi-même et à son esprit artistique. Tous les arts parlent de ça, l’esprit artistique et la façon dont tu l’utilises pour créer. J’ai aussi appris ça de John Steinbeck. Il croit que l’esprit artistique de l’humain, dans son individualité, est la chose la plus précieuse au monde. C’est ce qui nous sépare de toutes les autres espèces vivantes. C’est aussi ce qui nous rend humains.

  • Quelles sont les connexions entre la nature, l’environnement qui t’entoure, et ta musique?

C’est un tout. C’est tout ce que je peux dire en fait. La connexion vient du fait que tout est connecté. Tout. Toutes les choses qu’on peut voir, sentir et entendre.

  • Tu pars en tournée sur plusieurs dates jusqu’en avril comment tu sens cette nouvelle aventure?

Je dirais que je la sens bien. Je ne dirais pas que c’est complètement nouveau mais c’est toujours quelque chose de commencer à jouer des nouvelles chansons devant de nouvelles personnes. C’est ce dont il s’agit. J’aime écrire des chansons et j’aime les jouer pour d’autres personnes. Pour tout te dire, je dois être honnête, si je ne peux pas chanter pour les autres je ne pourrais pas faire ça du tout. J’ai besoin des autres, comme n’importe qui dans ce monde a besoin d’autres personnes. C’est ce qui fait que le monde tourne.

En tournée les 09 avril à l’AB,  Brussel, 11 avril au Little Waves de Genk, le 22 avril au Handelsbeurs de Gent, le 29 avril au De Roma à Antwerpen et le 6 mai au Reflektor de Liège…