Miki, la sensation pop qui fait «Graou»

Elle est incontestablement l’une des sensations pop francophones du moment, que le hit Échec et mat a propulsé dans nos oreilles émoustillées, sur de très chics plateaux télé et sur les scènes les plus convoitées. Miki est une jeune artiste franco-coréenne sans langue de bois au verbe hyper contemporain et résolument attachée au Luxembourg où elle a grandi. Au lendemain d’une presta iconique au Festival de Cannes sur le set de C à vous et de l’annonce d’un Olympia en octobre prochain, il était grand temps de tchatcher un peu avec la demoiselle et de l’installer à la fraîche sur la cover de ce numéro estival…
« Paris 2024, un cheval court sur la Seine et la revanche des nerds s’organise autour d’une table de ping-pong. Miki sort de sa chambre, pose son téléphone sur une voiture et enregistre un plan fixe à l’arrière d’un Buffalo Grill. Proche de la caméra, comme tombée du lit pendant la pause clope des employés, elle commence : À 19 ans je suis tombée sur un mec, 19 mois pour qu’il me sorte de la tête. Désarmante de simplicité, les réseaux s’interrogent et s’emballent. Le morceau atteint rapidement les millions d’auditeurs » : voilà comment est présentée Miki, celle qui fait tourner en boucle ses sons dans nos têtes depuis la sortie de son EP Graou en mars dernier et qui enchaîne dès lors les promos prestigieuses, chez Yann Barthès ou Anne-Élisabeth Lemoine…
Artiste franco-coréenne ayant grandi dans la capitale luxembourgeoise, Miki semble en parfait accord avec sa génération « twenty something », au contact de laquelle elle se constitue tous les jours un matériel foisonnant de mélodies et de punchlines, de « moments vécus ou hallucinés et de messages Whatsapp. » Elle ne retient pas ses coups, même envers elle-même, sans pour autant attaquer gratuitement. Le nom Graou, c’est aussi ça : c’est l’expression qu’elle utilise quand il lui arrive « un truc pas cool, mais pas grave ». Le tout sent le vrai, le vécu, mais aussi l’expérience du terrain qu’elle connaît depuis quelques années déjà. Elle sera d’ailleurs sur la scène de la BAM, le 5 décembre prochain, après un Olympia le 10 octobre qui va forcément compter. Cela semblait l’opportunité parfaite pour lui proposer la couverture de ce nouveau numéro, ainsi qu’une petite discussion entre deux festivals, entre Cannes et Toulouse…
Salut Miki ! Tout d’abord : entre tournée, plateaux télé et Festival de Cannes, ça va ? Pas trop crevée ?
Si, carrément même ! Le rythme est assez fou en ce moment, mais je lâche rien et je garde le cap, ça fait partie du jeu et y’a toujours des bonnes surprises sur le chemin. En quelques mois, ma vie a clairement changé du tout au tout, j’ai appris à faire des siestes efficaces dès que possible, comme par exemple sur ce trajet qui m’emmène au festival du Weekend des Curiosités, à Toulouse (rires).
Tu peux nous faire une petite bio express pour celles et ceux qui ne te connaissent pas ? Quelle est ton histoire avec le Luxembourg ?
Je suis née à Nice et j’ai grandi à Luxembourg, où je suis arrivée avec mes parents à l’âge d’un an – dans le quartier de Belair plus précisément. C’est un quartier qui a beaucoup changé ces dernières années, entre ville et campagne, où j’ai toujours adoré me perdre dans un certain spleen, un ennui créatif au bord des champs qui étaient l’extension de mon jardin. J’étais capable de juste regarder la rue pendant des heures et de créer des petites histoires et un univers dans ma tête ! J’étais même assez connue pour ça… Et ça m’a poussée aussi à rêver plus. Chaque passage à Luxembourg permet de me recentrer et fait partie de ma démarche artistique.


Comment est arrivée la musique dans ta vie ? Quelles ont été les personnalités qui t’ont inspirée ?
J’ai commencé avec le piano, puis j’ai été élève au Conservatoire de la Ville de Luxembourg dès mes 16 ans. Depuis quatre ans, je me suis lancée à fond dans la musique, avec des petits concerts et des collabs avec plein de personnes différentes, et dans la génèse de ce projet. J’ai une maman absolument fan de musique classique, Mozart résonnait tout le temps ou presque à la maison depuis mon plus jeune âge et on allait aussi souvent voir des concerts à la Philharmonie, donc on peut dire que j’ai baigné dans la musique. J’ai aussi pas mal été chiner dans la collection de vinyles de mon père avant de constituer la mienne… La construction de mon rapport avec la musique est cependant restée très « moi avec moi-même » : par exemple, personne ne savait vraiment que j’allais au conservatoire ! Je ne considérais pas ça comme « très cool » – parce que c’était franchement sérieux et, au final, pas très agréable – et j’ai donc très peu partagé cette expérience.
Y a-t-il eu des premiers concerts qui t’ont particulièrement marquée ?
Il y en a eu beaucoup, mais je dois dire que mon premier passage au festival de Dour a été vraiment marquant ! Et sinon, au Luxembourg, c’était à la Rockhal, avec les concerts de Mobb Deep et Mac Miller qui restent mémorables…
« JE CONSEILLE À TOUT LE MONDE DE PRENDRE UN VÉLO ET DE FAIRE UNE GRANDE BALADE À LUXEMBOURG, AVANT DE TERMINER AVEC UNE BONNE SOIRÉE AU GUDDE WËLLEN »
Qu’est-ce qui t’inspire aujourd’hui ?
Une fois de plus, pas mal de choses ! Si on parle de la scène actuelle, ce que font des artistes comme 070 Shake me plaît beaucoup. Je suis aussi très inspirée par le cinéma, qu’il soit coréen ou américain, avec des réalisateurs comme Wes Anderson ou Damien Chazelle…
Comment décris-tu ta musique ? Miki est aussi un personnage dans tes textes ou c’est juste 100 % toi ?
Je ne suis pas vraiment attachée au fait d’avoir une étiquette bien définie et je ne trouve pas vraiment d’autre terme qu’hybride. C’est très lié à mon mood, 99 % de ce que je dis c’est vraiment moi, c’est vrai, c’est tiré de mes pensées et de mes interactions réelles avec ce qui m’entoure, de sentiments vraiment éprouvés. Après, au début, je n’étais pas forcément fan de l’appellation « pop », mais je l’aime bien au final !

Quelle est l’influence de ton métissage franco-coréen dans celle-ci ?
Il est carrément présent, notamment dans certaines mélodies et dans des passages que je chante en coréen. Si tu prends par exemple le refrain d’héroïne, tu vas retrouver des sonorités limite kitsch, féériques à la K-pop ! Donc oui, cet héritage n’est jamais bien loin dans mon procédé créatif.
Échec et mat est un carton absolu, qui t’a propulsée sur le devant de la scène francophone en quelques mois à peine. Comment est né ce morceau ?
En fait, c’est un mash up de deux sons qui existaient déjà : le premier comportait le même refrain, mais que je chantais à l’époque en anglais ; et le second était un autre morceau que j’avais écrit après une espèce de rupture amoureuse un peu ringarde, beaucoup plus parlé. Quand j’ai associé les deux, pour arriver une fois de plus à un truc un peu hybride, ça m’a plu et le tout a été samplé par un artiste anglais… Ça a donné Échec et mat.
Quelle est l’histoire la plus dingue de ces derniers mois d’explosion médiatique ?
Je dirais le Festival de Cannes clairement, surtout que j’en sors à peine. Le plateau était hallucinant, j’ai croisé Spike Lee, des gens dans les loges qui venaient me féliciter pour mon travail, l’ambiance – d’autant plus que je suis très cinéphile. Complètement random en vrai (rires)…
« AU DÉBUT, JE N’ÉTAIS PAS FORCÉMENT FAN DE L’APPELLATION POP, MAIS JE L’AIME BIEN AU FINAL »
Y a-t-il des causes qui te sont importantes et pour lesquelles tu aurais envie de prêter ta voix dans le futur ?
Je pense et j’espère le faire déjà dans mes textes, notamment en ce qui concerne l’égalité hommes-femmes, une valeur qui me paraît évidente et primordiale aujourd’hui…
Quel retour sur ton concert récent à la Rockhal ? Tu connaissais ton public luxembourgeois ou pas encore ?
C’était vraiment un moment très cool ! J’avais une certaine appréhension, justement par rapport au public que je ne connaissais pas forcément bien, mais tout s’est super bien passé – alors que j’étais malade comme un chien (rires) ! La configuration dans le foyer faisait un peu apéro et s’est avérée très conviviale, ce qui a permis un bon échange avec le public.


Tu viens te produire à la BAM en fin d’année, le 5 décembre : qu’est-ce que tu peux promettre à ton futur public qui t’y attendra ?
J’ai envie de dire qu’à chaque concert, il se passe des trucs de fous, c’est toujours un moment unique à vivre en direct. Même si je ne connais pas encore la salle, j’ai envie de leur dire de venir comme elles et ils sont, que s’ils veulent venir déguisés c’est avec plaisir, le plus goofy le mieux !
Quels sont tes lieux préférés à Luxembourg ? Une ou deux adresses d’insider pour nos lectrices et lecteurs ?
Je conseille à tout le monde de prendre un vélo et de faire une grande balade déjà – mon trajet préféré serait Bertrange-Pétrusse – avant de terminer avec une bonne soirée au Gudde Wëllen, sans hésitation…

Si tu pouvais collaborer avec n’importe qui demain le temps d’un morceau ou d’un concert, qui aurait cette chance ?
Alors je dirais en studio, pour un morceau avec Steve Lacy !
Merci Miki !
Cette interview est à retrouver dans son intégralité dans le nouveau Bold Magazine #92, à lire en ligne ici!
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