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Okja, conte fantastique écolo et engagé

Texte : Jonathan Blanchet

Cannes, sélection officielle et compétition, suite. Emmenée par le prodige Bong Joon Ho (The Host), Okja, production originale Netflix (qui aura donc la particularité de sortir directement sur la plateforme de SVOD), se révèle poétique et militant.

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Présenté en compétition officielle, Okja ne sortira donc pas en salles (ou sur un nombre limité d’écrans dans le monde, lucky them). Le fait du prince, puisque Netflix a financé le dernier film du coréen Bong Joon Ho qui arrivera donc directement le 28 juin prochain sur vos (petits) écrans.  La polémique a suffisamment émaillé les débuts du Festival de Cannes pour que l’on ne revienne une énième fois sur le sujet. Tout juste pourrait-on regretter que la fable du réalisateur de Memories of Murder ne bénéficie pas de cette fenêtre de diffusion supplémentaire pour en apprécier autrement les qualités picturales. Car Okja est une belle réussite.

En gestation depuis 2005 dans l’esprit du réalisateur coréen, le film s’attache à retranscrire les liens d’amitié qui unissent une petite fille (la jeune Seo-Hyun Ahn, très bien) et Okja, une créature mi porc, mi hippopotame. En réalité, l’animal est le fruit d’une manipulation génétique et, comme nombre de ses congénères à travers le monde, il a été confié, à la naissance, à une famille de fermiers. Il aura vocation à être récupéré dix ans plus tard, par le conglomérat qui l’a conçu, pour offrir au Monde de nouvelles ressources alimentaires. Mais la petite fille ne l’entend pas de cette oreille…

Fable fantastique engagée, Okja donne, dans ses plus beaux moments, le sentiment d’avoir été réalisé par Hayao Miyasaki qui aurait délaissé l’animation pour un long-métrage en live-action. Poétique, il l’est assurément dans ses premiers instants, lorsque le duo, complice, bat la campagne coréenne. Le film atteint des pics d’émotion dans une scène où la petite d’homme est en danger de mort au bord d’une falaise ou dans un final qu’on ne spoilera pas et qui laissera les yeux les plus aguerris légèrement humides. Là-dessus, le film a réussi son pari : rendre la relation avec une créature de synthèse extrêmement crédible et engageante émotionnellement. Dans le cœur du récit, qui emmène l’héroïne à Séoul et aux États-Unis, le film entame une réflexion politique rudimentaire, dénonçant les manipulations de l’opinion par une multinationale, la consommation excessive d’aliments carnés, mais pas que… puisque même le jusque-boutisme de certains militants de la cause animale en prend pour son grade. Pour désamorcer la noirceur du propos et donner une respiration au film, Bong Joon Ho convoque un Jake Gyllenhaal cabotin en diable et une Tilda Swinton hystéro et sans états d’âme, dans le prolongement du personnage qu’elle incarnait dans Snowpiercer. Des moments d’acting pas désagréables pris à part, mais semblent exister en parallèle des morceaux de pur lyrisme qui composent le meilleur du film, qui devrait passionner jusqu’aux plus jeunes.