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Quand créativité et horticulture se rencontrent au LUGA

Par Fabien Rodrigues

C’est un voyage insolite qui se dévoile petit à petit et qui promet d’emporter les visiteurs sur plus de onze kilomètres de circuits où les paysages urbains, l’art et la technologie rencontrent la nature : le LUGA 2025 arrive à grands pas et sera, du 7 mai au 18 octobre, un pôle d’attraction indéniable dans la capitale luxembourgeoise et à Ettelbruck. Grâce aux nombreuses œuvres et installations à découvrir, la créativité exacerbée d’artistes et designers internationaux résonnera avec les écosystèmes d’accueil pour une grande première qui s’annonce très sensorielle…

On en a entendu parler depuis un petit bail, puis on a vu d’intrigantes constructions sortir du sol dans les espaces verts de Luxembourg, notamment le long de la Pétrusse, dont une belle partie du cours, dans la capitale et son parc éponyme, qui a été renaturalisé à grands coups de pelleteuses ces derniers mois ; dans la vallée de l’Alzette ou même dans le Parc municipal et au Kirchberg… On est tombé ici et là sur le logo de ce fameux LUGA 2025, ou encore sur cet indice « Luxembourg Urban Garden », mais qu’en est-il exactement ? Eh bien à l’instar de nos voisins, Luxembourg se dote à son tour d’une grande exposition horticole, pendant toute cette belle saison.

Initialement prévue pour 2023 puis repoussée, notamment à cause de la pandémie de Covid-19 et de ses conséquences, l’exposition LUGA 2025 vise ainsi à se hisser aux côtés de la Floriade aux Pays-Bas, des incontournables Bundesgartenschau en Allemagne, de Lausanne Jardins en Suisse ou encore des hortillonnages d’Amiens et du Festival international des jardins le long de la Loire, en France… À travers différents parcours, le public pourra ainsi, au gré de ses envies, profiter d’un moment de détente au milieu de jardins colorés, d’espaces d’exposition, de loisirs et de rencontres créés ad hoc pour cet événement très attendu – littéralement et au tournant !

UN RASSEMBLEMENT DE TALENTS

Une des caractéristiques du LUGA est qu’il va s’inscrire dans l’espace public extérieur – au sein du « poumon vert » de la capitale luxembourgeoise et dans la ville d’Ettelbruck. Pour ce dernier volet, l’axe thématique sera pertinent avec la localisation et la réputation agricole de la ville, mais à Luxembourg, c’est une véritable constellation de savoir-faire et de domaines d’expression qui vont agrémenter cet écosystème naturel.

« Dans ce sens, on se rapproche par exemple plutôt bien de Lausanne Jardins dont la mise en œuvre est très proche et avec qui nous avons beaucoup échangé. S’installer dans l’espace public urbain et un décor préexistant est un défi en soi – et nous avons de ce fait travailler un peu comme des acupuncteurs, c’est-à-dire en sélectionnant des points d’intérêts précis et en choisissant des projets qui leur convient de manière optimale. C’est aussi pour cela que nous avons travaillé essentiellement avec des architectes qui ont déjà collaboré sur de grandes expositions de la sorte », nous confie ainsi Ann Muller, coordinatrice générale de l’événement. Chaque architecte a ensuite choisi son lieu – un processus qui n’aurait nécessité qu’un seul tirage au sort tant chacune et chacun a su trouver chaussure à son pied unique, pour y installer un projet qui l’est tout autant, la création spécifique pour le LUGA faisant partie des conditions de participation.

Pas moins de quinze thèmes seront abordés pendant ce grand festival, de l’horticulture à l’urbanisme vert en passant par la viticulture, la durabilité ou le patrimoine. « Beaucoup de thématiques et de niveaux qu’il faut transposer, il fallait donc bien faire attention, pendant le travail de curation, à ne pas partir dans tous les sens pour diluer le message et la mission de LUGA 2025 », précise Anne.

ÉCOUTER LA NATURE

Impossible ou presque de passer donc en revue de manière exhaustive tout ce qui sera proposé aux visiteurs dans les différents espaces verts de la ville de Luxembourg… Mais dans « horticulture », il y a aussi « culture » – on a donc décidé de zoomer sur certains des aspects les plus créatifs de la manifestation et de dénicher, en amont, nos futurs coups de cœur… sonores ! Car effectivement, si tous nos sens seront sans doute mis à contribution pendant ce premier LUGA, l’ouïe devrait être tout particulièrement stimulée, avec des œuvres qui proposent d’écouter la nature. C’est le cas, par exemple, dans la vallée de l’Alzette avec Le chant de l’Alzette, fruit d’une collaboration entre Racine Carrée et Atelier Ty Maap. Située non loin de la rencontre entre Pétrusse et Alzette, dans le quartier du Grund, l’installation « crée le lien entre ce que l’on perçoit, la fréquence sonore, et ce que l’on entend, la chute d’eau ».

La présence invisible, mais acoustique de l’Alzette est mise en scène au travers d’une trame qui imprime au sol le dessin caractéristique d’une fréquence sonore en découpant l’espace en chambres végétales monochromes, reprenant les sept teintes de l’arc-en-ciel… Un rapport entre sons et couleurs que l’on pourra aussi retrouver dans Blue Sky de Jérôme Goedseels, dans le parc de la Pétrusse. À la manière d’une synesthésie, l’idée de ce projet est d’associer une oeuvre musicale – Mr Blue Sky d’Electric Light Orchestra – à une composition végétale qui réunit paysagiste et compositeur, afin de créer « des similitudes entre ces deux domaines artistiques et qu’émergent, après un travail d’analyse et de traduction, l’harmonie, le rythme, les dominantes, les contrastes et les émotions ».

Les oreilles devront enfin être bien grandes ouvertes dans un des projets les plus underground du LUGA 2025 – et c’est le cas de le dire, puisqu’à l’occasion de l’événement, c’est l’Aquatunnel de la capitale qui va être rouvert au public et doté de l’oeuvre sonore The Lower World, de Susan Philipsz. Créée spécifiquement pour l’Aquatunnel en partenariat avec le Mudam, The Lower World s’intéresse aux sirènes si chères au Luxembourg (coucou Mélusine). Et si le mot évoque l’eau, la mythologie, mais aussi les abris souterrains, il est aussi associé au thème du jardin, notamment chez les Grecs. Susan Philipsz propose ici de remplir l’Aquatunnel de sons, en travaillant avec les spécificités de l’espace de 900 mètres de long, passant sous la Ville-Haute et reliant la vallée de la Pétrusse au quartier Pfaffenthal…

MONUMENTA(L)

Outre ces oeuvres sonores à ne pas louper, les yeux risquent de se prendre une bonne rasade de créativité eux aussi, avec quelques projets d’envergure et des réalisations monumentales qui s’imposeront sans doute sur tous les réseaux sociaux cet été. C’est le cas de Racines du futur, un jardin éphémère créé par Atelier eem et Paysarchitectures qui « entrelace création sculpturale, accueille des usages et favorise une croissance végétale exubérante », à quelques pas des Rives de Clausen. « Le projet se découpe en trois phases : tout d’abord, le sol fertile est restauré, par la suite, des racines sortent du coteau et enfin des volubiles s’enroulent vers le ciel. Cette installation accélère le temps : subitement, des racines géantes sortent du coteau et partent à la conquête de la vallée de l’Alzette », explique l’équipe du LUGA.

Au Kirchberg cette fois, c’est entre autres The Living Pyramid de l’artiste hongroise Agnes Denes qui devrait fédérer les curieuses et curieux. OEuvre conçue comme un gigantesque jardin de plantes à fleurs s’élevant sur l’esplanade du parc Dräi Eechelen, elle fait « entrer les mathématiques et la vie végétale dans une merveilleuse harmonie : la précision et la stabilité de l’ingénierie se mêlent aux changements quotidiens de la croissance et de la survie », nous promet-on. Elle aborde aussi la question de la faim dans le monde et la menace d’un dépassement de nos ressources sans une meilleure planification – ou plantation ! « Encore une fois, mon obsession pour le mélange de la nature et de l’intellect humain, visualisant des forces opposées jouant en harmonie, créant le puissant paradoxe qui gouverne cette forme d’art et lui donne sa force », a déclaré à son sujet Agnes Denes. Il s’agira aussi d’une oeuvre participative, non seulement via l’intervention des communautés locales, comme les charpentiers pour sa construction et les bénévoles pour son entretien, mais aussi par le truchement d’une capsule temporelle qui sera enterrée dans les bois environnants et à laquelle tout un chacun pour participer en se rendant sur le site web du Mudam, qui commissionne The Living Pyramid.

Enfin, il sera dommage de passer à côté de Life on The Verge, une célébration et un jardin éducatif qui se concentre sur les cycles de vie extraordinaires et la diversité des espèces végétales qui habitent une zone largement ignorée par la plupart d’entre nous : les bords de routes. Cette végétation particulière est pourtant un habitat pour de nombreuses espèces sauvages et sera mise en lumière de manière spectaculaire non loin de la future Villa Pétrusse – dont l’ouverture très attendue, elle aussi, est prévue pour début juin – par la pointure mondiale Leon Kluge, véritable développeur de nouveaux paysages à travers la planète – et au Luxembourg dès ce début mai…

Ce format est à retrouver dans son intégralité dans le nouveau Bold Magazine #91, à lire en ligne ici!

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