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The Cure – 40 ème anniversaire : soleil de plomb pour festival en or

Textes : Thibaut André & Carl Neyroud
Photos (cellphone) : Carl Neyroud & Thibaut André
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La team musicale de Bold Magazine (Carl et Thibaut) a traversé la Manche pour vous ramener le récit de ce festival très cher à nos petits cœurs de rockers puisqu’il s’agissait d’une grande messe célébrant les quarante ans de notre groupe fétiche The Cure. Pour l’occasion, son leader charismatique, le très talentueux et énigmatique Robert Smith, nous avait concocté une affiche à tomber à la renverse.  On vous en livre les détails et impressions.

Il règne une chaleur intense avec plus de trente degrés sur la plaine de Hyde Park. On n’y trouve aucun orateur dans son célèbre « corner ». Et pour cause, on retrouvera les prêcheurs de bonne parole sur scène ce jour. Le site tend à ressembler au désert de Ouarzazate tant le ciel est bleu et la plaine aride. Mais ici, que de monde ! Le festival se joue à guichets fermés. Des gens sont venus des quatre coins du monde pour voir ce line-up de fous furieux.

Il est près de 14h lorsque la jeune formation mancunienne de Pale Waves entame son set. Leur indie pop façon easy listening est emmenée par une charmante chanteuse au look un peu gothique. Si le set est parfaitement exécuté, on regrettera une balance sonore peu à l’équilibre, la basse étant beaucoup trop prononcée (au point de nous donner des nausées). Pale Waves est un groupe à revoir dans d’autres conditions sonores.

A peine le temps de se désaltérer que les princes du shoegaze tendance dreampop monte sur scène : Slowdive. Le groupe formé en 1989 possède toujours ce son planant et éthéré, largement arrosé de réverb. On tombe à nouveau sous le charme de sa princesse en la personne de Rachel Goswell dont la voix est parfaitement en place ce jour. Le set est court, trop court, environ trente minutes, mais tous les tubes sont revisités avec brio. Le final sur le très approprié « When the Sun Hits » est d’une intensité remarquable. On a pris une belle claque et on en redemande.

On passe à la petite scène pour voir les Ecossais de Twilight Sad débuter leur concert. Formation postpunk/shoegaze datant de 2003, le groupe nous livre une prestation d’une intensité musicale incroyable, augmentée d’une lourde charge émotionnelle. Le chanteur James Graham est criant de sincérité. Son accent écossais qu’il conserve lorsqu’il chante lui donne un côté d’autant plus sympathique. Dans sa tête, il est comme possédé, habité. On remarque même des larmes coulant sur ses joues à la fin du set. Il remercie chaleureusement The Cure et le public d’être à l’affiche. De notre côté, on est sous le charme. Filez vite écouter attentivement leur petit dernier « Nobody Wants to Be Here and Nobody Wants to Leave » sorti en 2014. C’est une pépite.

La bande à Tom Smith (Editors) arrive ensuite sur scène tout sourire. A l’entame du set avec le titre « Hallelujah (So Low) » provenant du dernier album « Violence » sorti en 2018, la foule est déjà en transe. L’accueil du public est formidable. Lorsque résonne le single Munich, Tom court dans tous les sens et joue avec le public. Le set fut court, seulement 9 titres, mais la prestation fut remarquable.

Il est environ 17h30 et le soleil cogne toujours très dur. A ce sujet, on affiche déjà des faces rougies et de beaux coups de soleil. On évite les selfies car notre allure doit être proche de celle du chameau assoiffé au bord de la perte de conscience. Goldfrapp lance ses premières notes avec son électro pop et c’est une vague de fraîcheur qui nous submerge.  La chanteuse Alison Goldfrapp est très en voix et nous offre un show de très bonne facture avec des accents réminiscents du mythique groupe Portishead. Le final sur le tube « Strict Machine » fait vibrer et danser la plaine.

La sublime affiche nous indique que c’est le tour d’Interpol. Le quatuor postpunk new-yorkais emmené par le talentueux Paul Banks souffrait-il de la chaleur intense ce jour-là car le set semble pas très en place ? Il faut dire que le groupe joue en costume face au soleil. Mais est-ce une excuse ? Alors que leur concert du 19 août dernier à l’Atelier fut très bon, celui-ci laisse un goût amer, celui de la déception. Qu’à cela ne tienne, on continue.

A ce stade, malgré le couac précédent, on voit des mines réjouies : l’équipe nationale anglaise vient d’éliminer la Suède en quart de finale. Patrie du football, l’Angleterre est aussi celle de la pop au sens large. Sur cette combinaison détonante, la formation shoegaze de Ride débute son show sous les meilleurs auspices. Originaire d’Oxford et formé en 1988, le quatuor officie toujours sous le même line-up et venait défendre sur les planches son dernier album « Weather Diaries » sorti en 2017. J’ai du mal à mettre des mots sur les émotions et l’ambiance du concert tant l’intensité musicale était riche et puissante. En quarante minutes, Ride revisite des morceaux rarement joués pour un rendu incomparable. Dans le public, c’est l’hystérie au sens positif du terme. On chante et danse sans relâche, peu importe la chaleur. Il fallait vraiment être en terrain anglais pour vivre une telle expérience. Le set fut une démonstration de niveau international, Andy Bell et Mark Gardener le magnifiant par leur attitude humble et posée.

On arrive au clou du spectacle avec The Cure. Tête d’affiche évidente et raison d’être de ce festival, Robert Smith et son band affichent quarante printemps d’existence musicale en cette année 2018. Si le line-up des musiciens a évolué au fil du temps, celui-ci comporte aujourd’hui le mythique fondateur Robert Smith au chant et à la guitare, Simon Gallup à la basse (toujours lui, oui oui), Roger O’Donnell au clavier, Jason Cooper à la batterie et Reeves Gabrels à la guitare solo. Le groupe revisite sans faux col tous ses classiques. Pendant plus de deux grosses heures, tout y passe, ma bonne dame : Plainsong en intro, Picture of You, The Walk, Push, Just Like heaven, A Forest, Shake Dog Shake et Disintegration pour ne citer que quelques titres. Ce sont toutes les émotions de l’adolescence et du premier âge adulte qui remontent à la surface. En plus d’une grande messe, on assiste littéralement à une communion officiée par le grand prêtre Robert Smith, pape incontestable de la new wave. Tout le public vibre à l’unisson et reprend couplets et refrains (à noter que les Anglais ont le sens de l’unité rythmique, ce qui n’est pas souvent le cas ailleurs). Pour le rappel, The Cure envoie entre autres Lullaby, Friday I’m in Love, Close to Me, Boys Don’t Cry et 10:15 Saturday Night. C’est sur le légendaire titre « Killing an Arab » (NDLR : ce n’est pas un appel au meurtre ou à la haine mais une référence au roman L’Etranger d’Albert Camus) que le groupe termine le concert et nous laisse voguer dans un halo de béatitude et de grâce. Ce fut épique et joyeux, intense et profond.

Affiche et infos : http://www.bst-hydepark.com/events/detail/the-cure