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Petite histoire de la musique : la Future Beat

Texte Etienne Poiarez

Future-Bass ou Future-Beat, derrière ces termes un peu abstraits se cachent un style prometteur qui commence à obtenir ces lettres de noblesse. Les mélomanes de la musique électronique ont de plus en plus leurs noms sur les lèvres ; Cashmere Cat, Kaytranada ou encore Flume, dont le second album arrive très prochainement. De nouvelles têtes pour une nouvelle expérience sonore!

Les débuts

La musique électronique est peut-être bien le secteur musical le plus prolifique et inventif de ces 30 dernières années. Il rassemble une quantité astronomique de courants historiques et de pratiques esthétiques. Qui plus est, il continu de se réinventer en allant chercher ailleurs ou en se tournant vers l’inconnu. Tout ça pour en venir à la Future-Beat, ou peut-être bien Future-Bass, étant donné que l’on trouve les deux termes et qu’ils renvoient au même style. Encore inconnu du grand public il y a trois ans, ce courant a pris énormément d’importance, lorsque le producteur australien Flume à inondé le monde avec les tracks de son premier album, sobrement baptisé de son pseudonyme. S’il manque peut-être d’originalité pour nommer les choses, le jeune homme de 23 ans regorge d’inventivité en proposant des mélodies intenses et intelligentes, qui ont séduit un large public.

Pour les origines, on mentionne souvent le R’n’B, la Bass Music, le Hip-Hop et la House comme les courants fondateurs de cette nouveau style. Cependant, les ramifications sont beaucoup plus profondes et il est important de parler du Grime, un courant underground qui émergea au Royaume-Uni, vers le début des années 2000. A mi-chemin entre dancehall, drum’n’bass et UK Garage, le Grime est très lié au milieu Hip-Hop mais ce sont les instrus qui ont été récupérées pour bâtir la Future-Beat. Enfin, il est clair que ce vaste genre musical est aussi un mouvement post-dubstep, dont il a hérité des convulsions électroniques et que les travaux les plus récents en matière d’electronica ont influencés les harmonies. En bref, la Future-Beat est un véritable melting-pot sonore, qui s’accapare ce qui l’intéresse pour dessiner les contours d’une musique rythmée, enivrante et personnelle. Dernière chose notable, c’est est un genre assez proche du Trip-Hop, au sens où il regroupe une galaxie d’artistes, ayant chacun un style qui leur est propre. Bien entendu, le registre n’est pas aussi vaste mais on regroupe beaucoup d’électrons libres sous cette étiquette, qui symbolise plus une génération de producteurs ayant des patterns communs, qu’un mouvement artistique uniforme.

Au niveau de la composition, les traits caractéristiques sont une ligne de basse peuplée de breaks convulsifs et de quelques drops jouissifs, mêlée à des riffs de synthés très club. On peut y incorporer une voix suave, héritée du R’n’B et quelques effets personnels car la Future-Beat s’acoquine très bien avec d’autres sonorités comme le 8-Bit ou les samples. Un genre de nature expérimental, qui s’enrichit de l’univers de chaque artiste et se décompose en une flopée de nuances.

Les incontournables

Les premiers morceaux catalogués Future-Beat, réalisés par Cashmere Cat, Kaytranada et Flume pour les plus connus, apparaissent vers 2010-2011. La presse s’intéresse de plus en plus à eux, livrent des critiques élogieuses et diffusent leurs créations. On commence alors à chercher un terme sous lequel regrouper ces artistes, dont la musique semble si moderne et encore insaisissable. Des labels voient le jour çà et là en Occident, s’attachant à regrouper et diffuser les meilleurs producteurs et beatmakers de Future-Beat.

Alors qu’il n’existe encore que peu de structures cherchant à promouvoir ce nouveau courant artistique, la France semble avoir pris de l’avance grâce au label parisien Nowadays Records, fondé par Chomsky et Oogo, beatmakers de La Fine Équipe, qui forme également le duo Hoosky. On y trouve les fers-de-lance d’une nouvelle génération de musiciens qui fait grand bruit. On peut citer Everydayz, Yann Kesz, Phazz, Douchka ou encore Skence. Chez nos amis belges, le label bruxellois Pelican Fly abrite les productions d’artistes comme Canblaster, Lido ou Sinjin Hawke.

Le label américain Future Classic s’occupe de produire Flume et Ta-Ku. Les Allemands de Jakarta Records ont découvert le brillant Mura Masa et c’est aux anglais Counter Records, sous-label de Ninja Tune, que revient le mérite d’avoir propulser Odesza sur le devant de la scène. N’oublions pas les californiens de Soulection qui ne sont pas les derniers en matière de productions alléchantes. Ils comptent dans leurs rangs les magiciens du beat que sont Sam Gellaitry, MR. Carmarck ou encore le français Stwo. Des noms qui en disent long sur leur catalogue.

De par le monde se monte également des projets ambitieux, comme le super-groupe What So Not, formé par les producteurs australiens Emoh Instead et Flume himself, qui accoucha de trois EP’s avant que ce-dernier décide de retourner à d’autres projets.  En France, nous avons eu le droit en 2015 au projet Almeria, album-concept solaire composé par les producteurs Phazz & Everydayz, paru chez Nowadays encore!

Cette nouvelle scène musicale a profitée de l’essor d’internet et des nouveaux réseaux sociaux. La création des chaînes YouTube Majestic, Beast Koast et The Sound You Need, compilent de nombreux hits du genre, ainsi que les nouveautés et remix les plus intéressants du moment. Le développement assez récent de la plateforme de distribution audio en ligne Soundcloud, sur laquelle les musiciens et producteurs de tous horizons, peut collaborer, promouvoir et distribuer leurs projets musicaux a clairement profiter à la Future-Beat. En pleine expansion, ces nouveaux labels rencontrent un réel succès et se démarquent dans leur manière de promouvoir et diffuser la musique. Ecoute de chaque nouveau projet en streaming sur Soundcloud et libre téléchargement de certains morceaux, compiles, EP’s et même albums. Autant de nouvelles pratiques, utilisées par les structures indépendantes, pour renouer des liens avec les consommateurs volages. Au final, ce qu’il y a de plus beau à dire au sujet de ce courant musical, est qu’il est encore difficile à saisir, toujours si prompt à nous surprendre. Tant mieux! Une musique ne respecte jamais autant son public que lorsqu’elle décide de l’oublier, pour mieux se jouer des codes et aller vers l’inconnu.

En bonus, une petite playlist Future-Beat de qualité (à consommer sans modération) :


What So Not – Gemini ft. George Maple

Disclosure – You & Me feat. Eliza Doolittle (Flume Remix)

 Lido – Money

Sango – Me de amor

Everydayz & Phazz – Almeria

Miguel – Do You… (Cashmere Cat Remix)

Stwo – Lovin U 

Mura Masa – Love For That feat. Shura

Kaytranada – Kaytra Todo

Sam Gellaitry – Temple