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Godié, a.k.a le père de c’gars là

Texte Elèna Brihaye

Diego Castello alias Godié est un terrien. Il est argentin, luxembourgeois, multifacettes comme son travail. Son truc c’est le battle rap. Comme Eminem, oui c’est bien ça. On s’est rencontré dans un bar pour en savoir plus et autant le dire tout de suite, c’était assez perché (ou chéper, comme tu préfères). On a parlé de la Punch Ligue qu’il a d’ailleurs créée, et qui s’est tenue le 21 juin. Puis on a divagué sur Nieztche et Nirvana. Bref, on te laisse découvrir ça…

Qui es-tu Godié?

Un être humain

Mais encore?

Je m’appelle Diego, mais on m’appelle Godié. C’est le nom de MC qu’on trouve bêtement à 12 ans. Je suis argentin, j’ai 30 ans.

Comment t’as découvert le battle rap?

Je pense que j’ai découvert ça avec le clash de Jaz-Z contre Nas, le vrai Battle Rap. Puis, avec le film d’Eminem, et moi après qui ai fait des battles comme ça, comme Eminem, c’est-à-dire en impro, sur beat. Ensuite j’ai découvert le truc du battle à cappella. Je savais que ça existait mais je ne m’y intéressais pas plus que ça parce que c’était en anglais. J’ai commencé avec le Rap Contenders, le “RC”, la première ligue française. C’est la 6ème ligue mondiale, juste en dessous de l‘américaine, et la philippine, eux ils font le plus de vues, ils sont trop fous, c’est les meilleurs les philippins, ceux qui pèsent le plus en tout cas.

T’as commencé à quel âge à peu près?

J’ai commencé à rapper quand j’avais 17 ans, ça veut dire que j’ai fait mon premier morceau studio, un home studio chez DJ Maty, c’était en 2003. Puis j’ai fait mon premier battle rap à 26 ans seulement.

C’était contre Incizif non?

Monteur oner! Incizif c’était mon 4ème battle. J’en ai 15 là et je vais sur mon 16ème.

Et la Punch Ligue alors, qu’est-ce que c’est?

C’est la ligue luxembourgeoise. Comme la WordUP!, la ligue de Montréal. T’as le RC, c’est la Ligue parisienne. C’est une communauté. La Punch-Ligue existe depuis novembre 2012 je crois, juste avant la fin du monde.

C’est moi et mon gars “Mario” pour Mariovitch. Tu sais que j’ai fait un film qui était au cinéma et tout? Il s’appelait Fameux Gars et Mariovitch était l’attaché de presse de ce film. C’est là qu’on s’est connus. On voulait faire un projet et voilà. Lui c’est le vrai bras droit si tu veux, il gère toute la logistique.

Comment vous avez fait pour vous produire?

Ça c’est KissKissBangBang, tu connais? C’est du crowfouding. On a mis un projet, 6 000 balles, 60 jours, mais ce n’est pas vraiment une collecte. C’est un échange. Pour 5 € t’as ton nom dans le générique, pour 10 balles je t’envoie l’affiche dédicacée par tous les MCs et un sticker à la maison. C’est un délire… ! Du coup j’ai fait les 6 000 en question.

Tu peux nous parler des MCs qui vont s’affronter?

On a quand même trois battles qui se détachent sur la feuille, mais moi mon battle préféré est même pas trop annoncé, Benji / 2 Taff.

C’est pour toi le plus prometteur?

Benji est policier au Luxembourg. C’est son 4ème ou 5ème battle. On l’a déjà attaqué là-dessus, mais il sait quoi répondre. Sur quoi tu peux l’attaquer? Il le sait déjà lui. Il sait ce qu’il va te répondre. Il a le temps de se préparer. Il faut que ce soit bon, il faut que les gens en aient pour leur argent. Donc voilà, c’est mon battle préféré même si ce n’est pas mon battle le plus “chère”. C’est une belle confrontation de styles.

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 Justement toi et Louvar vous allez affronter Aparzite et Red, tu le sens comment ?

Je le sens bien comme d’habitude, toujours bien en fait. Personne ne me fait peur, et un Louvar encore moins. Il a une feuille parfaite. C’est le plus jeune de la carte, aussi, il a 20ans. C’est le meilleur. Donc comment je sens le battle? J’ai un peu peur pour Apparzite et Red quoi. J’ai envie qu’ils aillent jusqu’à la fin du battle. Je ne dirai que ça [rires]. Ils vont prendre chère !

 Du coup vous échangez avant les battles?

 C’est comme la boxe. Ça dépend de la mentalité de chacun. Il y a des boxeurs qui parlent, qui s’arrangent, qui se respectent, qui vont aller juste dans la performance physique et sportive. Et il y a ceux qui ne se respectent pas, et qui en subissent les conséquences. Comme dans la vie. Tu ne travailles pas qu’avec les gens que t’aimes bien.

 Donc le Battle Rap, ce n’est pas que de l’amour ?

 Non. Ça c’est la phrase d’Arcane, “les battle c’est que de l’amour”. Les battle c’est que de la mort. En l’occurrence si tu veux tout savoir, même si on a prévu des trucs de batard pour leur battle, je ne vais pas m’amuser à chercher quel travail fait sa maman. Je pourrai. Mais moi aussi j’ai des proches, et je n’ai pas envie qu’on parle d’eux. Donc je ne vais pas chercher à blesser les gens à ce niveau. Après il y en a d’autres qui s’en foutent, genre “j’aime mes enfants et je sais que ce n’est pas vrai donc je m’en fiche”, mais si tu te fais prendre par un mec intelligent, ça peut vraiment faire très très mal…

 Ça t’est déjà arrivé?

Je l’ai fait au début. Mes premiers battle ils ont été écrits pour détruire les autres. Un jour j’affronte un russe de 20ans, “T’es russe, t’as 20 ans: ta mère doit être bonne”. Voilà, ça c’est un peu blessant, même si c’est sûrement vrai (rires). J’ai pu dire des choses vraies, que j’ai regrettées. Du coup maintenant quand on me propose de m’expliquer, j’ai plus envie. Viens on se fait des faces qui sont pas vrais: “ta mère est tellement grosse qu’elle tombe des deux côtés du lit”. On s’en fout, elle n’est pas grosse sa mère. Mais c’est drôle, ça fait quand même rire. Amusons-nous.

Après il y a tout un côté du game qui aime bien ça. Les gens cliquent sur les bagarres sur le net. On vit dans un monde comme ça. Mais moi je n’aime pas. Donc à la punch ligue il n’y a pas ça.

 C’est toi qui a déterminé tous les matchs?

Là, dans ma ligue, c’est tout moi, oui. Comme je fais confiance au président de la Ligue française quand il me matche avec quelqu’un.

T’es fière de ce que tu as construit?

Super fière. Mais je n’aurai jamais pu le faire tout seul non plus. A côté de moi j’ai Mariovitch. Et pour cette édition, j’ai ma frangine.

Comment tu te prépares pour un battle ?

Alors bien que tout le monde dise qu’à chaque fois c’est la même chose, et bien on se prépare à chaque fois différemment par rapport à l’adversaire. En l’occurrence là on a deux petits nerveux de Metz, deux élèves qui veulent faire tomber le maître, et bah on va leur donner une fessée quoi! Chaque phase doit te faire regretter de rapper. Là je me prépare en me demandant ce qu’ils vont faire, en devinant ce qu’ils vont faire, et en faisant mieux quoi.

Peut-être qu’ils vont arriver en force ?

Ils peuvent, ils ont intérêt. Louvar les bat tout seul avec une main dans le dos.

Tu te sens comment quand quelqu’un te clash? Il se passe quoi dans ta tête?

Pokerface. Je fais comme si ça allait.

Comment tu fais pour rebondir comme ça? Genre en impro?

Je le fais jamais, j’ai dû le faire une ou deux fois, mais c’est compliqué, y a pas d’impro. Il faut être prêt, connaître d’abord son sujet avant de pouvoir expérimenter. Si tu te sens bien alors t’y vas mais bon… Il y en a beaucoup qui y perdent des plumes.

C’est ta passion le rap?

Non, c’est la musique ma passion. En fait moi j’aime pas trop le rap à la base. J’écoute à longueur de journée les Red Hot Chili Peppers, Rage Against The Machine, Nirvana je connais tout, j’ai fini le journal intime. Ça c’est ma passion. J’aime bien ce qui est bon…

Du coup, y a la punch ligue, mais est-ce que tu fais autre chose à côté?

Ouai je prépare un EP, ou un album je sais pas encore, un projet CD… Enfin, c’est même plus “CD” maintenant, c’est un projet iTunes (rires). J’ai des chansons. Je fais un peu d’impro aussi, j’ai fait la finale du End of the Weak, que j’ai gagné et là je vais à Montréal représenter la Belgique. .

Alors que tu es luxembourgeois?

Je ne suis pas Luxembourgeois! Je suis argentin, et encore à la base je suis d’origine syrienne et catalane. Je suis un être humain de la Terre. Je pense que les forces viennent des faiblesses… C’est Nietzche qui dit ça non?

Je crois oui…

Genre quand il dit que le premier mec qui a voulu s’habiller, c’est celui qui avait froid… Bref, j’ai nulle part où m’attacher. Je viens de nulle part en fait.