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Romain Muller, tout pour la musique

Texte : Sarah Braun
Crédit photo : Romain Gamba

La voix est aussi claire et solaire que sa silhouette est élancée et élégante. Romain Muller est ce dandy des temps modernes, que l’on avait laissé au terme de son dernier concert, alors qu’il faisait la première partie de Voyou et Miel de Montagne. Il y présentait alors son dernier clip « Au bord », réalisé par un autre Messin, Romain Gamba. Le 19 mars, il revient avec un tout premier EP, dans lequel -littéralement – il se jette à l’eau. Avant ça, il nous avait donné rendez-vous au bar le P’tit Local, à deux pas des Trinitaires.

« Bain de minuit est à la fois la suite logique de ce que j’ai accompli dans le passé, pourtant c’est aussi un saut dans le vide car c’est sûrement la toute première fois que je peux me livrer à cœur ouvert. »

En effet, Romain Muller est loin d’en être à son coup d’essai. S’il a décidé de se la jouer solo depuis deux ans, il a commencé avec Posterboy Machine, qu’il avait créé avec sa sœur. Le sort en décide autrement. Alors que, pour lui, la musique est au premier plan, elle occupe une place moins importante dans la vie des autres membres de Posterboy Machine. « C’était mon choix, je ne pouvais pas attendre qu’ils soient autant impliqués, je comprends tout à fait que nos envies ne soient pas sur le même tempo. »

Et puis naquit Romain Muller…

Il y a deux ans, Romain Muller quitte sa ville d’adoption, Strasbourg, pour revenir dans sa Lorraine natale. « De Strasbourg, Metz me fascinait. On voyait plein d’artistes émerger : Cascadeur, Grand Blanc, Chapelier Fou. Rien de tel à Strasbourg ! » Ses intuitions se confirment dès son arrivée. « Depuis que je vis ici, je me rends compte que l’impulsion est là, certes de manière cyclique, mais on va résolument vers du positif. Sans cesse émergent de nouveaux talents, des projets, des assos. Ça part dans tous les sens, on sent que les gens ont envie de donner sa chance à la culture, et la musique en est le centre névralgique. » Là, il s’y fait une nouvelle famille de cœur, mais surtout découvre une ville à la dynamique culturelle incroyable. « Metz est une ville à taille humaine. Partout, tout le temps, tu rencontres des gens de ce milieu. J’aime leur humilité, leur simplicité. Tu échanges facilement, avec des personnes de tous les horizons. J’adore l’idée de pouvoir parler avec des gens qui ont des savoir-faire que je ne possède pas, c’est super intéressant, et ça peut aboutir à de beaux projets. Metz a résolument un côté décomplexé qui me plaît. »

L’envie était déjà fortement présente, mais c’est là que le déclic se passe. C’est ainsi tout naturellement Metz a donné l’impulsion vitale à Romain Muller, son projet solo, il y a un peu plus d’un an.

« Quand je réfléchissais un nom de scène, je cherchais un truc marrant. Et puis, je me suis dit que j’allais m’en lasser en moins de deux mois. D’un autre côté, c’est tellement commun de s’appeler ‘Romain Muller’ – c’est sûrement l’un des noms les plus courant dans le Grand Est -, que je me suis dit que cela pouvait être drôle. J’aimais l’idée de m’appeler comme Monsieur tout le monde. Pour autant, c’est un peu étrange de voir mon nom, celui que je notais minutieusement sur mes copies de bac, placardé sur la pochette de cet EP. C’est à la fois flippant et excitant (rires) ! »

Immersion en Bain de Minuit

Sa musique est un hommage aux nombreuses influences qui gravitent dans son univers. S’il vient de la scène underground, qu’il a un peu abandonnée depuis, il confesse un amour sans bornes pour la pop française, mais surtout la musique des années 70. « Des mecs comme Serge Gainsbourg, évidemment, mais aussi C Jérôme ! Ses chansons sont un peu kitsch, j’avoue, mais ses productions sont vraiment bonnes. Je suis également un fan de la première heure de Véronique Sanson. Et de Charlotte Gainsbourg aussi. Elle incarne une élégance et un chic que j’admire, c’est une artiste complète, et pas seulement une interprète. Elle m’inspire énormément. » Comme elle, Romain fait tout, exception faite du mastering.

Et, pour la première fois, il se dévoile. « Je ne sais pas si c’est de façon consciente ou non, mais je me suis vite rendu compte que mes textes étaient plus intimes que lorsque j’écrivais pour Posterboy Machine. Sûrement parce que je pouvais, enfin, m’autoriser la première personne. Très vite également, j’ai capté des motifs récurrents dans mes chansons. La nuit, bien sûr, je suis un animal nocturne. Il y a l’eau aussi. Ça, je n’arrive pas vraiment l’expliquer, il faudrait demander à un psy (rires) ! C’est comme cela que s’est naturellement imposé le nom de l’EP, Bain de Minuit, qui conjugue ces deux thématiques. »

Pour autant, ne cherchez pas un fil rouge dans cet album, chaque chanson raconte sa propre histoire et sacralise un instant. « Quand j’écris, je fonctionne un peu comme un arrêt sur image. Par exemple, j’ai écrit « Papillon de nuit » après avoir vu un papillon coincé dans un abat-jour, alors que je travaillais. Très vite, il est mort. En me renseignant un peu, j’ai appris qu’il ne vivait qu’une journée. Cela m’a attristé. C’est cette histoire qui a donné lieu à cette chanson. » Comme Baudelaire, il est cet artiste qui aime à capturer les petits détails du quotidien, ceux qui d’ordinaire passent inaperçus, afin de les immortaliser.

Mais s’il œuvre la plupart du temps la nuit, dans son antre créatrice, Romain confesse aimer travailler avec la famille qu’il s’est faite depuis son arrivée dans la cité messine.

« Il y a Romain Gamba, qui a été l’une des premières personnes que j’ai rencontrées à mon arrivée. On collabore très souvent. Il y a aussi Laurent Steiner. D’ailleurs, tous deux ont collaboré sur le clip de « Au bord ». Je leur ai laissé carte blanche. On était chacun dans notre truc, à fond, comme des gosses. On était chacun un peu émerveillé. Bosser dans un tel état d’esprit, c’est juste formidable. Seule la musique permet de mettre en commun des savoir-faire différents, et, plus que tout, j’aime le côté humain. »

Promouvoir la musique plus que tout

Un amour des gens et des talents qui vient également de donner naissance à un second projet dans lequel Romain Muller entend bien s’investir à fond dans les moins à venir : celui du label Coco Machine, inauguré le 29 février dernier, au bar le Troubadour, à l’occasion d’une soirée éclectique – et électrique -, avec un concert de 2PanHeads et un DJ Set de Zéro Degré, tandis que lui mixait en live pour l’occasion. « J’ai eu un vrai crush avec les mecs de 2PanHeads, ça n’arrive pas souvent. Je suis content qu’ils soient signés sur Coco Machine. Baguette Crew vient de nous rejoindre : là aussi, ce sont deux gars que j’adore, c’est une fierté de travailler avec eux. »

Mais Romain Muller reste humble et prend tout ce qui arrive comme une chance. S’il confie ne pas être de nature à être fier, il avoue être très heureux de pouvoir faire la musique qu’il aime, entouré de gens talentueux qui sont des amis. « La vie ne devrait être que ça, j’ai vraiment de la chance. » Et pour l’heure, il attend avec impatience la sortie grand public de l’EP – le 19 mars – avant de reprendre une série de concerts pour continuer de se faire connaître.