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48h de visites et de pintxos à San Sebastián

Par Laura Centrella

Si San Sebastián, « Sanse » pour les intimes, n’a pas les richesses culturelles de Bilbao ni de Vitoria-Gasteiz — capitale de la communauté autonome du Pays basque, elle est sans conteste une destination balnéaire de choix ! Et en matière de gastronomie, et surtout de pintxos, elle bat toutes les autres villes basques à plat de couture. Notre experte Laura Centrella s’en est assurée sur place et nous raconte tout…

Le pintxo, kézako?

À la base, le pintxo (en basque) ou pincho (en espagnol), est une variété régionale de tapa. Il s’agit d’une petite tranche de pain sur laquelle on dépose un ingrédient, originellement fixé par un cure-dent. D’où son nom qui dérive de l’espagnol « pinchar » – piquer, fixer. Même si aujourd’hui, rares sont les pintxos à arborer un cure-dent. Le terme peut ainsi désigner des petites bouchées variées: tortilla (omelette espagnole), croqueta (le plus souvent à la viande), bolo de queso (croquettes de fromages), bocadillo (petits sandwichs garnis…), etc. Des bouchées qui peuvent même parfois être très raffinées!  Dans tous les cas, on les dégustera au bar, accompagnées d’un petit verre de vin rouge (txikito), de txakoli (vin blanc plus ou moins acide), d’une bière (caña) ou de cidre (sagarno). À moins d’opter pour un vermouth (souvent appelé Marianito et généralement fortifié avec du gin, servi avec des glaçons, une tranche de citron ou d’orange et une olive) ou pour un kalimotxo (vin rouge allongé d’eau gazeuse ou de limonade). 

« Ir de pintxos »

L’une des habitudes les plus populaires des habitants de Saint-Sébastien est de faire la tournée des bars à pintxos, activité appelée ici « ir de pintxos ». Cette coutume basque consiste à construire son repas de bar en bar, en commandant, à chaque étape, un verre et un tapa basque. Depuis quelques années, les restaurateurs de San Sebastián ont aussi lancé le « pintxo-pote ». Non, il ne s’agit pas d’aller « pintxoter » avec ses potes, même si l’un n’empêche pas l’autre! Pote signifie en fait une boisson et il s’agit d’une formule pintxo + boisson vendue à un prix raisonnable, servie uniquement certains jours de la semaine et pendant une durée limitée. Et ce pour inciter Basques et touristes à visiter les très nombreux bars que compte la ville. C’est le seul moment où le pintxo est servi accompagné d’une boisson, car c’est bien là la différence majeure entre tapa et pintxo, le premier est en général servi gratuitement lorsqu’on commande un verre d’alcool!

La tradition des pintxos remonte aux années 1930 à Donostia (nom basque de San Sebastián), quand la ville était connue comme la « Perle de Cantabrique ». À l’époque, les familles royales d’Europe se pressaient, l’été, dans cette cité balnéaire de la Belle Époque, à la suite de la régente d’Espagne. Elle y fit d’ailleurs construire le palais de Miramar de style anglais, toujours visible aujourd’hui dans le parc du même nom, duquel on a un magnifique point de vue sur l’enchanteresse baie de la Concha et sur l’îlot de Santa Clara.

C’est parti mon kiki!

Maintenant que vous savez tout ce qu’il faut savoir sur les pintxos, il est temps de démarrer ce périple à San Sebastián. Et l’on peut s’y mettre dès le matin! Dans la ville nouvelle, il ne faut surtout pas manquer l’Antonio Bar,qui sert dès 9h30 l’une des meilleures tortillas de la ville, une omelette aux pommes de terre bien baveuse! Mais aussi d’excellents bocadillos au jamón ibérico

Après le petit-déjeuner, on se dégourdit les jambes en faisant une balade le long de la baie en forme de coquillage (concha), direction le funiculaire, pour grimper au sommet du Monte Igueldo. De là, le panorama est à couper le souffle, avec vue sur l’océan, la rade et sur San Sebastián, enceinte dans son cirque de montagnes. Là-haut, on peut aussi vivre une expérience un peu hors du temps… en faisant un tour sur les montagnes russes vintage de l’un des plus vieux parcs d’attractions au monde, ouvert en 1912. 

Mais il est temps de redescendre pour se diriger vers la Parte Vieja, la vieille ville de San Sebastián. Là, après avoir fait un tour dans la basilique de Santa Maria del Coro et admiré son exubérant portail du XVIIIe siècle, on débute la tournée pintxos par le Tamboril, l’une des meilleures adresses de Donostia, pour se régaler d’anchois marinés, de piments padrón frits ou de poivrons piquillos farcis au thon. Mais on y vient également pour la sélection pointue de txakoli et de vins nature basques. 

À deux pas, les mêmes propriétaires possèdent le Ganbara, le plus chic des bars à pintxos de Sanse! Là, c’est la corne d’abondance sur le bar: cèpes, morilles, artichauts de Tudela, asperges blanches, coquillages et crustacés… Tout nous fait de l’œil! On goûte à des percebes (pouce-pieds), à un énorme carabinero (crevette écarlate), à la laitance de merlu et à une spécialité basque appellée txangurro, en général une araignée de mer farcie, ici remplacée par du crabe… Délice, mais c’est quand même un peu chérot!

Playa & Fashion

On passe quelques heures à la plage, en alternant playa de la Concha — où l’on admire La Perla, un superbe bâtiment Belle-Époque qui témoigne de l’engouement des bains de mer à Sanse au début du XXe siècle, aujourd’hui transformé en centre thalasso —, et playa de Ondarreta, dans le prolongement, et qui s’étend jusqu’au pied du Mont Igueldo. On parcourt ensuite les boutiques de la très chic ville nouvelle, pour découvrir les créateurs de mode locaux et espagnols. Comme Oh Tocados, pour des bijoux fantaisie et des accessoires sympas, ou Purificacion Garcia, une marque barcelonaise qui propose des tenues colorées et des sacs origami à tomber.

C’est bien connu: la mer, ça creuse! Retour donc dans la vieille ville pour poursuivre nos explorations. L’apéro se fera au Borda Berri, un bar où l’ambiance règne du midi au soir et où il faut jouer des coudes pour passer commande. Ici, on aime tout! Les joues de veau au vin rouge, les oreilles de cochon croustillantes sauce tximi-txurri et même le pastasotto de puntalette (pâtes grecques) à l’Idiazabal (fromage local au lait de brebis). En tout cas, c’est bien meilleur qu’à la Cuchara de San Telmo, recommandée par tous, mais où tous les plats sont assaisonnés de la même manière et où le txakoli est servi en mode folklo — un peu comme pour le thé à la menthe, en imprimant un mouvement du bas vers le haut, pour le faire pétiller… 

Coucher de soleil et txuleta

Avant de poursuivre la soirée, on ne manque pas le coucher de soleil sur la baie de la Concha. Voir le soleil mourir dans l’eau est une expérience d’une beauté quasi métaphysique.

Le dîner se fera au Bar Nestor, adresse reprise dans tous les guides. À raison! Ici, c’est simple: le serveur parade avec deux côtes de bœuf (txuleta), on choisit celle qui nous fait de l’œil et c’est tout! On la déguste ensuite, parfaitement grillée, assis — si on a de la chance! — ou accoudé au bar, avec une assiette de padrón frits, une délicieuse salade de tomates et un verre de viño tinto (rouge) espagnol. L’énorme txuleta continue de cuire à table… et elle est dingue! Pour 45€ la pièce de bœuf, on n’est pas volé.

Du cheesecake et encore du cheesecake!

Pour le petit-déjeuner suivant, direction la Casa Otaegui – deux adresses à Donostia. Dans cette pâtisserie familiale née en 1886, on vient goûter à la spécialité de la maison, la Panchineta. Sorte de galette des Rois feuilletée, où la crème pâtissière remplace la frangipane, et recouverte d’amandes grillées. Pas mauvais.

On passe le reste de la matinée au Museo San Telmo. Dans cet anciencouvent du XVIe siècle transformé en musée, on en apprend plus sur l’histoire et la culture basque, et l’on admire, entre autres, des œuvres espagnoles du Greco, de Ribera mais aussi de l’Italien Tintoret.

Le midi, on fait une pause bienvenue à la Casa Urola. On choisit un toast aux anchois, un autre à la truite fumée, un morceau de bonite et quelques asperges blanches de Navarre au jamón. C’est bien bon! On pousse aussi la porte du Txepetxa, un bar spécialisé dans les anchois, servis ici à toutes les sauces! On retient le « jardinera », un toast d’anchois marinés recouverts d’une garniture fraîche de poivrons et d’oignons. 

On continue ensuite au Bar Sport. Si l’on est un peu déçus par leur fameuse crème d’oursin, la txistorra (saucisse au piment doux) est savoureuse, ainsi que la Gilda. S’il y a bien un pintxo que l’on dénichera partout au pays Basque, c’est bien celui-là! Soit une brochette de guindillas (piments verts doux au vinaigre), olives et anchois, appelée Gilda en l’honneur du personnage joué par Rita Hayworth dans le film noir du même nom, sorti en 1946, et projeté au festival du film de San Sebastián…

On se finit enfin chez La Viña avec un cheesecake basque de folie bien crémeux! Allez, on avoue, on y a aussi été le premier soir! Quand vous l’aurez goûté, vous comprendrez pourquoi…

Shopping gourmand et table gastro

L’après-midi, c’est de nouveau shopping! Mais gourmand cette fois, pour ramener quelques délices dans les valises… Premier arrêt à la fromagerie Elkano, pour une très belle sélection de fromages locaux. De l’Idiazabal évidemment, mais aussi des petites productions fermières moins connues. Si on veut faire le plein de txakoli et de vins nature de la région, direction Goñi Ardoteka,dans la vieille ville. 

Au San Martin Merkatua, on emporte anchois, guindillas et autres légumes (comme, en saison, les guisantes lagrimás, des petits pois minuscules, appelés le caviar vert basque…). Et, au Mercado Bretxa, des charcuteries espagnoles et du bacalao, de la morue salée et séchée déclinée ici dans des dizaines de découpes différentes.

Le soir, changement de décor, avec un restaurant étoilé. Les pintxos sont une merveilleuse tradition, mais on a parfois envie de déguster un repas assis dans le luxe, le calme et la volupté… Dans une ville qui compte le plus grand nombre de restaurants étoilés par habitant en Europe, le choix n’est pas facile.

On opte finalement pour une star montante de la gastronomie espagnole, Paulo Airaudo, chef né en Argentine dans une famille d’immigrés italiens, aujourd’hui à la tête d’une petite dizaine de restaurants dans le monde. Dont le Amelia, adresse doublement étoilée de San Sebastián. Fan de Star Wars et de Lego, le chef tatoué y propose une expérience omakase ludique qui en met plein la vue! Avec, par exemple, un délicieux chawanmushi (flan japonais) au crabe royal et consommé de jambon ibérique, des pasta farcies à la pomme de terre et au taleggio servies avec un beurre au vin jaune, et une inclassable glace au rhum et bananes grillées couverte de caviar. Du grand art! 

Où dormir?

Pour avoir le plaisir, au réveil, d’ouvrir grand ses fenêtres sur la baie de la Concha, deux hôtels au luxe abordable:

Hotel de Londres y de Inglaterra (Zubieta Kalea, 2) au charme Belle-Époque ou l’hôtel Villa Favorita (Zubieta Kalea, 26) toujours dans une villa du XIXe siècle, mais plus moderne, et qui accueille l’excellent restaurant Amelia** ainsi qu’un bar à cocktails.

Bon plan (en dehors de la haute saison):

L’hôtel Villa Katalina by Intur, à côté de la cathédrale du Bon Pasteur, offre des chambres design abordables à dix minutes à pied de la vieille ville.

Ce format est également à retrouver dans le Bold Magazine #80, à lire en ligne ici!

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